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Bienvenue à toi, aventureux surfeur, qui vient s'échouer en quête de sens gustatif. Ici tu trouveras des récits d'agapes, des notes de dégustations bacchiques et des adresses prometteuses compilées avec amour.

lundi 21 avril 2008

L'Atelier de Joël Robuchon en famille

La récente publication de l’édition 2008 du Guide du Pneu ne vous a certainement pas échappé, pas plus que les turbulences diverses et variées provoquées par cet évènement (ou non-évènement, les avis sont partagés).
On peut applaudir les inspecteurs pneumatiques ou crier au scandale façon Marchais, reste que la meilleure des vérités est celle qui nous est personnelle. Donc, tout comme pour le vin, la meilleure façon de se faire une opinion, c’est de déguster.
Un autre à priori lié à la publication du Guide Rouge est l’effet newtonien de l’action-réaction de la part des impétrants, décorés ou dégradés. Vont-ils se reposer sur leurs lauriers, mettre les bouchées doubles ?


Joël Robuchon l’avait fait savoir en sortant de sa retraite, il ne souhaitait pas figurer dans le Guide Rouge. Malgré tout, les inspecteurs ont fait leur travail et l’ont distingué, tant pour l’Atelier que pour la Table. La perspective de passer une journée seul en compagnie de ma fille ainée m’a donné la possibilité de mettre à l’épreuve les deux macarons récemment gagnés par l’Atelier et mettre à jour mon opinion à son sujet.
On aurait pu imaginer que le concept du comptoir sur la cuisine ouverte n’aurait pas forcément bonne presse auprès des inspecteurs clermontois. Certes, l’endroit offre un niveau culinaire digne d’une étoile, mais deux ? Ne serait-ce pas une incitation à en faire plus tant dans l’assiette que sur les tarifs ?

Nous arrivons sur les lieux pour le service de 11h30. L’accueil est aimable, le service prévenant. Pour l’instant pas de modification notable.
Ma fille ayant, pour une fois, un appétit d’oiseau, elle se contente de commander un plat. Pour ma part, j’opte pour deux entrées et un plat.
La carte des vins au verre est toujours aussi bien fournie. En prévision des asperges, je m’écarte de l’accord traditionnel au muscat sec pour privilégier le Vouvray « Haut-Lieu » du Domaine Huet en 2006. Las, quand le verre arrive, le vin a tout sauf le caractère d’un chenin. Je m’en inquiète auprès du sommelier qui, après avoir confirmé la dilution du vin, ouvre une autre bouteille. Je retrouve enfin le Vouvray que je connais.
Arrivent les asperges vertes de la Drôme, sauce hollandaise. Elles sont d’un beau calibre et cuites à la perfection, c’est-à-dire fermes et fondantes à la fois. La sauce hollandaise est un modèle d’onctuosité. En bon père consciencieux d’éduquer le gout de ma fille, je lui fais partager mon entrée. Ni une, ni deux, une assiette qui lui est destinée arrive presqu’aussitôt et elle se délecte finalement de ses propres asperges.
La seconde entrée est constituée d’encornets à la plancha aux saveurs espagnoles : dans l’assiette se mêlent la chair de l’encornet à peine cuite et des dés de tomate et de jambon ibérique, le tout relevé au piment. C’est simple, léger, très fin.
Le vin du jour est un Château Haut-Cassans 2004, proposé en double-magnum. Comment résister ? Il accompagne gentiment mon foie de veau, rondelles d’oignons frits et roquette au balsamique. Le foie est rosé mais pas trop, les oignons font le délice de ma fille et la roquette apporte un pointe de fraicheur et d’amertume en contrepoint du moelleux du foie.
Ma fille, grande amatrice d’oignons frits donc et de morilles, a choisi le pavé de turbot à la plancha, accompagné de morilles. La cuisson du poisson est parfaite, les morilles gouteuses. « Y’en a trop » dit-elle… Serait-elle déjà blasée ?? Non, seulement dotée ce jour-là d’un petit estomac. Et c’est papa qui en profite aussi.
Et pour accompagner cela, me direz-vous ? Inutile de demander, la fameuse purée de pommes de terre arrive en même temps que les plats. Que dire ? On sait bien que le rapport pommes de terre/beurre ferait bondir un nutritionniste paralytique, mais qu’est-ce que c’est bon !!
Nous partageons ensuite l’assortiment de tartes maisons. Pommes, cannelle, flan aux framboises, citron et chocolat/noisette aux cacahouètes. On ne change pas un dessert qui gagne…
Divine surprise au moment du dessert, le chef sommelier arrive avec deux flutes et une bouteille dont la forme me rappelle quelque chose. Il remplit les verres d’une boisson effervescente. Devant mon regard intrigué, il dit goguenard : « C’est un chenin spécial ». « Du chenin d’Italie, » lui réponds-je en souriant, ayant reconnu une bouteille de Moscato d’Asti. A notre surprise, il pose les flutes devant nous en nous expliquant qu’il s’agit d’une petite compensation pour le verre de chenin dilué. Je ne sais pas pour vous, mais j’apprécie toujours beaucoup ce genre de petite attention. C’est une petite merveille de fruit (raisin frais, pèche de vigne), légère et rafraichissante. Et comme ma fille n’apprécie pas trop, le second verre fait le bonheur de mon voisin, intrigué par le manège du sommelier.

En conclusion, une étoile, deux étoiles… L’Atelier reste fidèle à lui-même : convivial, sérieux sans être guindé et proposant une cuisine de gout et de saveurs, magnifiant le produit sans le dénaturer, sans négliger la carte des vins, et à mille lieux de ce qu’on peut lire dans le dernier ouvrage de Jonathan Nossiter. Ce jour-là, Philippe Braun était à la baguette. Grâce lui soit rendue pour ce bon moment de partage en famille.

François

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