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mercredi 28 juin 2017

Grand Tour du Jura (11/32) : La Saline Royale d'Arc-et-Senans


Après le Jura et Salins-les-Bains, nous passons au Doubs avec Arc-et-Senans et la Saline Royale.

L'épuisement des forêts autour de Salins-les Bains et l'impossibilité topographique de construire des bâtiments de graduation, destinés à augmenter la concentration en sel de la saumure, ont conduit à la recherche d'un emplacement d'une nouvelle unité de production de sel ignifère. Un site fut trouvé entre les villages d'Arc et de Senans, à proximité de la forêt de Chaux.
Le projet de construction fut confié à Claude-Nicolas Ledoux (1736-1806), alors Commissaire aux salines de Lorraine et de Franche-Comté, puis, du fait de sa nomination à l'Académie royale d'architecture, Architecte du Roi.

Claude-Nicolas Ledoux est un visionnaire et son projet est ambitieux car il envisage de construire une cité idéale autour de la saline.


Malheureusement, le résultat final sera bien plus modeste quoique novateur. Dans une enceinte destinée à décourager les voleurs, les différents bâtiments administratifs, de production et de vie des ouvriers sont disposés régulièrement en arc de cercle de 370 mètres de diamètre.


La route d'accès, qui vient en droite la ligne du pont de la Loue, conduit au bâtiment d'entrée.


Remarquez les motifs qui forment les seuls éléments décoratifs et qui figurent sur tous les bâtiments, à l'extérieur comme à l'intérieur.


Il s'agit d'une urne renversée d'où s'écoule la saumure.

Le bâtiment d'entrée est le seul point de passage dans l'enceinte afin de contrôler les entrées et sorties. Il comportait un poste de garde, une prison, un lavoir et un four banal.


De style dorique à l'extérieur, il est doté d'un péristyle décoré comme une grotte en pierres brutes, symbole de l'intérieur de la terre d'où est extrait le sel.


Au delà de la porte cochère, toujours en droite ligne, l'allée centrale conduit jusqu'à la maison du Directeur.


La position centrale de cette dernière permet de surveiller les autres bâtiments, d'où l'oculus sur le fronton de la façade. Il diffère des autres car il est doté d'un péristyle dont les colonnes doriques sont constituées d'une alternance de pierres carrées et cylindriques, au relief saisissant et inédit.



La maison du Directeur est flanquée de deux bernes, lieux de production du sel ignifère. On y faisait chauffer la saumure dans des poêles, au nombre de quatre dans chaque berne.


Aux extrémités de l'arc des bernes se trouvent les bâtiments des commis, bâtiments administratifs, dont l'un était occupé par la gabelle.


Remarquez les petits édicules aux quatre coins, ce sont les sanitaires de l'époque.

Le reste de l'arc de cercle est occupé par quatre bâtiments disposés symétriquement, les berniers. Les deux qui entourent le portail d'entrée était occupés par la maréchalerie et la tonnellerie. Ainsi les poêles, les tonneaux et leurs cerclages pouvaient être réparés directement sur place.


Les deux autres servaient d'habitation pour les ouvriers sauniers et leur famille.

Sur le pourtour extérieur, entre les bâtiments et l'enceinte se trouvaient les jardins des ouvriers afin qu'ils n'aient pas à sortir de l'enceinte de la Saline.

La construction de la Saline fut entreprise en 1775 et achevée en 1779.
Afin de produire du sel, la Saline avait besoin de saumure. Cette dernière était acheminée des puits de Salins-les-Bains par un saumoduc, double canalisation enterrée de 21,25 kilomètres qui profitait d'une déclivité de 104 mètres le long des cours des rivières Furieuse et Loue.


(C) BY-SA 3.0

Tout d'abord construites avec des troncs de sapin évidés, ces canalisations furent progressivement remplacées dès 1788 par des tuyaux en fonte à cause des des pertes dues aux fissures et aux perçages effectués par les voleurs de sel. On estime que 30% des 135 000 litres de saumure expédiés quotidiennement étaient ainsi perdus.

Avant la phase de chauffe, la saumure subissait une phase de concentration à l'aide d'un bâtiment de graduation. Situé en dehors de l'enceinte de la Saline, il était constitué d'un canal, d'une immense structure en bois de 496 mètres de longueur sur 7 mètres de hauteur, et du logement du charpentier chargé de son entretien.


Le but était de d'augmenter la concentration en sel de la saumure grâce à un processus d'évaporation. La saumure était pompée à 5 mètres de hauteur puis s'écoulait par un tuyau percé de trous sur des fagots d'épines. L'évaporation était facilitée par le passage du vent. Le processus était répété 5 fois afin d'obtenir la concentration voulue. La saumure concentrée était ensuite dirigée dans un immense bassin de 5 mètres de profondeur et d'une capacité de 200 000 litres avant d'être envoyée jusqu'aux poêles.
Aujourd'hui, il ne subsiste plus que les dispositifs hydrauliques et le logement du charpentier.

La production de la Saline n'atteint jamais le rendement escompté et la concurrence avec le sel marin, transporté par chemin de fer, sonna le glas de la Saline qui ferma ses portes en 1895. Après maintes vicissitudes, le Département du Doubs en fit l'acquisition en 1927 et entreprit sa restauration. En 1982, elle fut inscrite au patrimoine mondial de l'Humanité par l'Unesco.



François

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